Le chanvre
En France, déjà connue des gaulois, cette plante a pris un essor remarqué au cours du 13ème siècle. La culture du chanvre a connu son apogée au milieu du 19ème siècle en 1840, 176 000 ha sont cultivés en France.
Puis progressivement abandonné, victime de la disparition de la marine à voile, de l'apparition du coton puis des textiles synthétiques, sa culture ne subsiste que pour la fabrication de la pâte à papier.
En 1913 on ne cultive plus que 14 500 ha et probablement moins de 100 en 1960
Sa culture est intensive dans certaines régions, l'Anjou, la Bretagne, qui fournissent la marine royale.
Sa culture est plus familiale dans d'autres régions, notamment en Limousin, où dans un système autarcique, elle est la seule façon de se procurer la toile nécessaire à la confection des vêtements, des draps et autres linges de maison.
Vers 1905 on cesse de cultiver le chanvre (la charbe), concurrencé principalement par le coton.
Nos anciens, « faisaient » du chanvre, uniquement pour se vêtir. Mais sa culture, son traitement les occupaient toute l'année et cela n'était pas toujours, chose facile.
Chaque propriété, même la plus petite, a sa chénevière. C'est un petit champ d'une excellente terre, de place fixe, rarement supérieure à 20 ares. Avant les semailles, on prépare le terrain par plusieurs labours, de façon à obtenir une terre meuble. On fume abondamment avec le fumier des bêtes. Les semailles commencent avec la chaleur, au retour des tourterelles. On sème alors le chénevis en bande de 1m à 1m50 et on recouvre au « triant ».
Pour protéger la semence des oiseaux, on place dans le champ des épouvantails.
La récolte
En deux mois, la plante atteint près de deux mètres de haut. Vers la fin de l'été, on arrache d'abord le chanvre mâle mûr le premier ; puis, 3 semaines après, les pieds femelles porteurs de graines. Selon la grandeur du terrain on récolte cent ou deux cents poignées que l'on amène à rouir dans des charrettes à vaches.
Le rouissage
Rouir c'est noyer le chanvre afin de décoller l'écorce de la tige en détruisant la matière gommeuse (pectine) .Le rouissage a lieu en eau stagnante, dans une mare ou sur les bords d'un étang peu profond.
Le chanvre est mis dans l'eau par couches croisées, dix ou quinze poignées dans un sens, puis autant dans l'autre et superposées. De grosses pierres maintiennent le tout au-dessous de l'eau.
Là pendant une dizaine de jours, l'écorce se décompose, elle « trempe ». Les tiges s'assouplissent.
Le broyage
Le chanvre, sorti de l'eau, est mis à sécher au soleil. Puis il est mâché à l'aide du « machadou » (lu machadour), sorte d'étau de bois monté sur pieds et composé de deux parties s'emboîtant l'une dans l'autre et d'une longueur de un mètre vingt environ.
Les tiges ainsi broyées sont mises à sécher dans le four, une fois le pain sorti, et elles y restent deux ou trois jours. C'est alors que, toutes chaudes, les tiges sont «barguées» à l'aide d'un appareil (la barge) .Le bruit des « bargues » est plus fort que celui du « machadou » et résonne le soir, au clair de lune, dans les cours des fermes. Il s'entend de village à village. On est au mois d'octobre.
Le peignage
Ou bien le peigneur de chanvre vient dans les fermes ou bien les paysannes préfèrent filasser leur chanvre elles-mêmes. Trois peignes aux dents de plus en plus rapprochées sont utilisés successivement ce qui permet d'obtenir une filasse de plus en plus fine, le boueradis, puis l'étoupe et enfin le brin .
Le filage
Etoupe et brin sont filés séparément et ont des usages différents. La fileuse, file à la veillée ou dans les champs en gardant les vaches. Le bois de la quenouille est le plus souvent du noisetier. Les fusées sont mises en écheveaux sur un dévidoir
Le lavage
Comme pour les "bujeades" on entasse les écheveaux dans un cuvier ou «bujeadier» en les recouvrant de cendres finement tamisées. Le tout est alors arrosé d'eau bouillante, on laisse tremper environ une semaine.
Le séchage a lieu à l'ombre, sur une haie ou sur une palissade. Puis on met les écheveaux en pelotes
Le tissage
Lorsque vers la fin de l'hiver la famille a terminé de confectionner enfin toutes ses pelotes, la maîtresse de maison les apporte chez le tisserand. Le tisserand est la figure emblématique des villages, à tel point qu'il a donné son nom à de nombreuses familles : Tisseron, Texier, Tixier, Tessier, Tissier, Teyssère, Texandier.
Son atelier est sombre et humide, car l'humidité est nécessaire pour que le fil soit plus souple et donc plus facile à travailler. L'atelier est le lieu de rencontre du village. On vient voir le tisserand et discuter. Les enfants sont admiratifs devant le maniement du métier à tisser qui fait un bruit cadencé qui s'entend du matin au soir.
Le tisserand reçoit donc les pelotes dont il prélève un certain nombre en guise de rémunération. Cela lui permet de fabriquer sa propre toile qu'il vend ensuite dans les fermes ou dans les foires.
La toile permet de confectionner vêtements, draps, torchons ...
Jean Lacombe, le dernier tisserand de Haute-Vienne a vécu à Séreilhac puis à Limoges.
Né en 1912 il nous a quitté en 2005 à une époque où le fabricant de tissus ne vient plus à domicile nous proposer sa production comme jadis, mais époque où nous pouvons commander par Internet l'étoffe de chanvre !!!.